OUATE ET VERRE

OUATE ET VERRE

26.1.12

CAILLOU

Pour Un mot. Une image. Une citation.

Photo (c) suzanne  http://photos-promenade.be/

Depuis le temps que mon frère avait visé cette lampe avec des cailloux, il n’était pas encore arrivé à la briser. Quand je lui proposai qu’il y lance une brique, il me fila une de ses gifles brevetées, et j’avais l’oreille qui bourdonna pendant trois jours. A partir de ce moment-là, je me contentais de le regarder sans rien dire. Patiemment.

C’est ainsi que je passai mon enfance, à regarder en silence mon frère tenter l’impossible. Oui, c’était défendu, oui, on allait payer cher un crime éventuel, mais le défi était plus fort que nous. C’était son voyage dans la lune, son escalade d’Everest. Un moyen de passer les soirées où ni papa ni maman ne rentraient de leur boulot.

Un jour, c’était mon frère qui ne rentra pas. Je me dis que cela voulait dire qu’il était grand, comme papa et maman, qu’il ne reviendrait plus de son boulot le soir. Que je pouvais enfin donner de mes conseils dans la rue pour casser les lampes et éteindre la lumière dont profitait tout un chacun sans la mériter.

Quand je sus enfin ce qui lui était arrivé, je quittai la maison en hurlant. 

J’allai sous ce putain de lampadaire, et je le cassai avec mon premier caillou.

9 commentaires:

  1. On a tous eu envie un jour de casser une ampoule, une vitre, comme ça, pour rien, pour le plaisir bête de casser.
    Alors autant que cela soit pour quelque chose qui vous aide à extérioriser une frayeur,une peine, une douleur.
    Plutôt que de taper des poings sur la table, ça fait moins mal!

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  2. Son désir est un exemple de son caractère, sa situation nous paraît simple, mais elle est, au contraire, complexe.

    Merci pour ton com' !

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  3. la pertinence, le plaisir empoisonné de ce premier caillou dépend de ce qui lui était arrivé et que nous ignorons

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  4. Brigetoun a raison, nous ignorons ce qui lui était arrivé.

    Ce premier jet peut être motivé par la douleur d'avoir perdu son frère, ou par la joie de pouvoir maintenant faire ce qu'elle ne pouvait auparavant.

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  5. Et le mystère reste entier puisque de cette histoire nous en sommes érduits à deviner la tragédie !
    Je vais aller faire un tour sur "1mot. 1image. 1citation" histoire de découvrir la consigne :)
    Bravo pour ce texte Joye, efficace et intense !

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  6. @ Chris : tu y es toujours la bienvenue !

    @ brige et sklabez : Je connais l'auteure, je penche pour le sens que la fille est enfin de libre de faire ce qu'elle a toujours su faire : réussir où son frère avait échouer. La baffe suite à sa suggestion est un bon indice de ce que j'avance...pourquoi regretterait-elle un frère brutal ?

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  7. yipes : où son frère avait échoué

    (la hoooooooooonte !)

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  8. Mais non ! Pas la honte !
    Que celui qui n'a jamais péché te jette ... le premier caillou ;-)

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  9. Pour les anglophones, ce n'est pas une erreur commune - nous ne confondons pas les participes et les infinitifs - c'est juste un simple lapsus clavier.

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