Le matin retentit comme ce gong au village Hutong et les vieux sortent de leurs petites ruches carrées comme des dizaines de petits bourdons bleus, chacun avec une cage à la main. Arrivés au parc, ils accrochent les cages aux arbres, et les oiseaux dedans se mettent à chanter, oubliant les barreaux de bambou dans leur désir de faire entendre la joie d'encore une liberté illusoire. En bas de ces arbres, les corps bleus s'alignent dans une vieille danse slow, les bras faisant des arcs, les jambes relevées et crochues, à deux pas d'antiquité. Une heure passée, tendons et ligaments doucement réveillés, ils s'accroupissent pour boire du thé refroidi dans des bocaux aux bords ébréchés.
OUATE ET VERRE
OUATE ET VERRE
27.11.07
26.11.07
23.11.07
Oracles
Au bout du mur, l'inaccessible dit ton nom. -- Jean-Claude Renaud, Oracles
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Je colle l'oreille
Contre les pierres froides.
Je retiens mon souffle,
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Le mortier résonne
Des syllabes blanches et grises.
Je tâte avec les doigts,
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Les échos silencieux se cachent
Dans les creux
Entre caillou et ciel.
Je pose mon front sur son coeur.
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Je colle l'oreille
Contre les pierres froides.
Je retiens mon souffle,
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Le mortier résonne
Des syllabes blanches et grises.
Je tâte avec les doigts,
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
Au bout du mur
L'inaccessible dit mon nom,
Les échos silencieux se cachent
Dans les creux
Entre caillou et ciel.
Je pose mon front sur son coeur.
J'attends,
Inaccessiblement
Au bout du mur.
13.11.07
Le parfait voyageur
Le parfait voyageur ne sait où il va. -- Lie Tseu
Le parfait voyageur
ne sait où il va.
Je serai donc,
Pour un temps,
Imparfaite.
Je désexisterai un peu ici,
Pour aller inexister
Là-bas.
Il faut faire de la place
Pour l'imperfection.
Il faut inexister
De temps à autre.
Le parfait voyageur
Ne sait où il va.
Soyons donc
Imparfaits,
Toi et moi,
La main dans la main.
Le parfait voyageur
ne sait où il va.
Je serai donc,
Pour un temps,
Imparfaite.
Je désexisterai un peu ici,
Pour aller inexister
Là-bas.
Il faut faire de la place
Pour l'imperfection.
Il faut inexister
De temps à autre.
Le parfait voyageur
Ne sait où il va.
Soyons donc
Imparfaits,
Toi et moi,
La main dans la main.
11.11.07
La Joconde
[pour les Impromptus Littéraires]
Paris, le 11 novembre 2007
Ma très chère Joye,
C’est avec grand plaisir que j’apprends que tu pars bientôt pour revoir mon pays natal, je sais que tu vas t’y amuser beaucoup. J’aimerais bien le revoir un jour, moi aussi, ça fait déjà un moment !
Tu es une grande voyageuse, et moi aussi ! Bien que nous nous soyons connues pour la première fois à Paris – je me souviens que tu étais choquée de voir que j’étais vraiment très petite – je n’ai pas toujours vécu au Louvre, tu sais. Quand j’ai déménagé en France avec Léonardo, je vivais d’abord à Amboise. Quand le maître est mort, on m’a installée à Fontainebleau. Après, j’étais à Versailles, mais j’avoue que je n’aimais pas le décor là-bas, trop chichiteux pour mes goûts.
Comme tu sais, après la Révolution, je suis allée vivre au Louvre, mais j’ai pu sortir de temps à autre. Napo m’a forcée d’aller vivre chez cette garce de Joséphine aux Tuileries pendant quelques années. J’ai aussi pu retourner brièvement en Italie avec ce voleur de Perugia ! Ah, quel mec !!! Je lui serai toujours reconnaissante de m’avoir entretenue pendant deux ans avant qu’on me renvoie en France. J’étais contente d’avoir ce peu d’amusement après presque 100 ans du même vieux train-train poussiéreux.
Et puis, c’est vrai que pendant la guerre de ’39, on se chargeait de me cacher, d’abord à Amboise. Tu sais, même après toutes ces années, on n’avait pas changé grand-chose dans cette baraque ! J’ai aussi vécu dans une abbaye. Crois-moi que, pour une fois, j’étais contente que mon Léo ne m’ait pas peinte sans vêtements ! Dans cette même période, j’ai aussi dormi sous un lit en Quercy. Oui, bon, entre mon asthme et les moutons de poussière, c’était pas la joie, mais j’étais quand même heureuse de ne pas être obligée d’aller vivre avec ce petit monstre moustachu à Berlin. Je te dis, Joye, c’est fou ce que les hommes peuvent être fous !
Depuis, bon, j’ai vu la Russie et le Japon. C’était drôle d’aller voir New York. Ton Président Kennedy, quel tombeur !!! La blonde qu’il aimait, j’ai entendu qu’elle a mal fini, c’est terrible. Alors, là, c’était une beauté ! Et moi, oui, je suis vieille, mais je n’ai pas trop mal vieilli, on m’a bien soignée, je ne demande pas mieux.
Quoique…
Oui, quand même, il y a une chose qui m’embête. Toi, tu n’es pas revenue me voir – non, non, je ne te fais pas de reproches, je sais que tu as d’autres amis à revoir lorsque tu es à Paris – mais depuis 2005, je suis installée dans une grande salle face au Noces de Cana par Veronese. Si tu ne connais pas, tu peux Googler, hein ?
Bon, voici le problème : ça fait plus de deux ans que je zieute ce stupide tableau, et je ne vois toujours pas…
Alors, Joye, fais-moi un petit service, je t’en prie. Avant de partir en voyage, ma petite chanceuse, dis-moi un truc.
Sur ce stupide tableau : Où est Charlie ?
Allez, ma belle, je t’embrasse bien fort. Buon Viaggio e multi bacci, ragazza !
Éternellement,
Mona Lisa Maria Gherardini
Ma très chère Joye,
C’est avec grand plaisir que j’apprends que tu pars bientôt pour revoir mon pays natal, je sais que tu vas t’y amuser beaucoup. J’aimerais bien le revoir un jour, moi aussi, ça fait déjà un moment !
Tu es une grande voyageuse, et moi aussi ! Bien que nous nous soyons connues pour la première fois à Paris – je me souviens que tu étais choquée de voir que j’étais vraiment très petite – je n’ai pas toujours vécu au Louvre, tu sais. Quand j’ai déménagé en France avec Léonardo, je vivais d’abord à Amboise. Quand le maître est mort, on m’a installée à Fontainebleau. Après, j’étais à Versailles, mais j’avoue que je n’aimais pas le décor là-bas, trop chichiteux pour mes goûts.
Comme tu sais, après la Révolution, je suis allée vivre au Louvre, mais j’ai pu sortir de temps à autre. Napo m’a forcée d’aller vivre chez cette garce de Joséphine aux Tuileries pendant quelques années. J’ai aussi pu retourner brièvement en Italie avec ce voleur de Perugia ! Ah, quel mec !!! Je lui serai toujours reconnaissante de m’avoir entretenue pendant deux ans avant qu’on me renvoie en France. J’étais contente d’avoir ce peu d’amusement après presque 100 ans du même vieux train-train poussiéreux.
Et puis, c’est vrai que pendant la guerre de ’39, on se chargeait de me cacher, d’abord à Amboise. Tu sais, même après toutes ces années, on n’avait pas changé grand-chose dans cette baraque ! J’ai aussi vécu dans une abbaye. Crois-moi que, pour une fois, j’étais contente que mon Léo ne m’ait pas peinte sans vêtements ! Dans cette même période, j’ai aussi dormi sous un lit en Quercy. Oui, bon, entre mon asthme et les moutons de poussière, c’était pas la joie, mais j’étais quand même heureuse de ne pas être obligée d’aller vivre avec ce petit monstre moustachu à Berlin. Je te dis, Joye, c’est fou ce que les hommes peuvent être fous !
Depuis, bon, j’ai vu la Russie et le Japon. C’était drôle d’aller voir New York. Ton Président Kennedy, quel tombeur !!! La blonde qu’il aimait, j’ai entendu qu’elle a mal fini, c’est terrible. Alors, là, c’était une beauté ! Et moi, oui, je suis vieille, mais je n’ai pas trop mal vieilli, on m’a bien soignée, je ne demande pas mieux.
Quoique…
Oui, quand même, il y a une chose qui m’embête. Toi, tu n’es pas revenue me voir – non, non, je ne te fais pas de reproches, je sais que tu as d’autres amis à revoir lorsque tu es à Paris – mais depuis 2005, je suis installée dans une grande salle face au Noces de Cana par Veronese. Si tu ne connais pas, tu peux Googler, hein ?
Bon, voici le problème : ça fait plus de deux ans que je zieute ce stupide tableau, et je ne vois toujours pas…
Alors, Joye, fais-moi un petit service, je t’en prie. Avant de partir en voyage, ma petite chanceuse, dis-moi un truc.
Sur ce stupide tableau : Où est Charlie ?
Allez, ma belle, je t’embrasse bien fort. Buon Viaggio e multi bacci, ragazza !
Éternellement,
Mona Lisa Maria Gherardini
8.11.07
Ils sont venus...
Ils sont venus pour mes ailes.
Et j'ai dit, bon, prends-les, je marcherai.
Ils sont venus pour mes jambes.
Et j'ai dit, bon, prends-les, j'ai bien marché, j'aurai mes bras pour dessiner.
Ils sont venus pour mes bras.
Et j'ai dit, bon, prends-les, j'ai ma tête, elle m'aidera à voyager.
Ils sont venus pour ma tête.
Et j'ai dit, bon, prends-la, j'aurai toujours mon coeur qui bat.
Ils sont venus pour mon coeur.
Et j'ai dit non.
Je me serais battue avec mes ailes, avec mes bras, avec mes jambes.
Je me serais battue avec ma tête.
Mais mon coeur, il était à toi,
Ce n'était pas à moi de le donner.
Et ils me l'ont arraché.
Et je n'avais plus d'oreilles pour t'entendre,
Je n'avais plus d'yeux pour te voir,
Je n'avais plus de bras pour te serrer,
Je n'avais plus de jambes
Pour mettre autour de toi
Pour mieux te garder contre moi.
Ils ont pris mon coeur,
Ils ont pris mon coeur,
Mais le souvenir de toi
Est resté dans ma peau
Et je ne suis plus rien
Qu'une stupide coquille
Mais le souvenir de toi
Est resté dans ma peau
Est resté dans ma peau,
Et ils sont venus pour mes ailes.
Et j'ai dit, bon, prends-les, je marcherai.
Ils sont venus pour mes jambes.
Et j'ai dit, bon, prends-les, j'ai bien marché, j'aurai mes bras pour dessiner.
Ils sont venus pour mes bras.
Et j'ai dit, bon, prends-les, j'ai ma tête, elle m'aidera à voyager.
Ils sont venus pour ma tête.
Et j'ai dit, bon, prends-la, j'aurai toujours mon coeur qui bat.
Ils sont venus pour mon coeur.
Et j'ai dit non.
Je me serais battue avec mes ailes, avec mes bras, avec mes jambes.
Je me serais battue avec ma tête.
Mais mon coeur, il était à toi,
Ce n'était pas à moi de le donner.
Et ils me l'ont arraché.
Et je n'avais plus d'oreilles pour t'entendre,
Je n'avais plus d'yeux pour te voir,
Je n'avais plus de bras pour te serrer,
Je n'avais plus de jambes
Pour mettre autour de toi
Pour mieux te garder contre moi.
Ils ont pris mon coeur,
Ils ont pris mon coeur,
Mais le souvenir de toi
Est resté dans ma peau
Et je ne suis plus rien
Qu'une stupide coquille
Mais le souvenir de toi
Est resté dans ma peau
Est resté dans ma peau,
Et ils sont venus pour mes ailes.
7.11.07
3.11.07
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