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| Tableau par Samuel Baldwin |
Marthe nouait fermement les rubans sous son menton substantiel et vertueux.
Ce ne serait pas respectable d'y aller sans faire preuve de sa toilette habituellement impeccable.
Il fallait observer ses habitudes, même un jour de fête.
Certes, elle y était habituée, elle en avait témoigné d'autres.
Et pourtant, ses mains tremblaient légèrement et il lui a fallu trois fois pour que le noeud soit parfait.
Oh, la première fois, oui, c'était un peu déconcertant. Elle n'avait eu que vingt ans à l'époque.
Mais maintenant, alors, maintenant, c'était différent.
Elle connaissait bien les rites : se préparer, s'y rendre, témoigner l'acte, et puis rentrer et prendre un petit verre d'eau-de-vie pour s'en féliciter, oui.
À chaque fois, elle se sentait triomphale, sûre de la bonté des ses proches et fière de vivre dans un tel pays !
Dans la glace, elle nota une petite bulle de salive qui échappait de sa bouche, et elle essuya soigneusement ses lèvres qui ne souriaent pas souvent.
Mais bon, faudrait quand même qu'elle se dépêche un peu si elle souhaitait arriver au bon moment.
Bien après la dénonciation, certes, et le début du châtiment - parfois les cris la troublaient encore - mais bien avant la partie la plus importante.
Après tout, ce n'était pas tous les jours, après tout, et au contraire de tout ce qu'on disait ailleurs, ce n'était pas tous les jours qu'on pendait un des ces sales créatures !
ah les modes du temps ! (mais il me semble que justement elle est en retard, à son époque c'était devenu honteux d'aimer ça, non ?)
RépondreSupprimerTu rigoles, n'est-ce pas ?
RépondreSupprimerQuelle drôle d'histoire!
RépondreSupprimerAu début de ma lecture j'ai bien cru qu'elle se rendait à un rendez-vous galant. Une habitude comme une autre de tromper son monde et surtout son mari.
Et puis, la fin de l' histoire!
Mais j'ai relu ce magnifique petit récit et je constatais que d'une affaire cruelle de pendaison, une seule bouche bée nous ramenait à ma première version imaginée de l'histoire!...
Merci versus, c'était mon intention, je suis heureuse d'y avoir réussi.
RépondreSupprimerDu pain et des jeux !
RépondreSupprimerUne pendaison ici, un gibet à Montfaucon, une guillotine en place de Grève, du goudron et des plumes...
Pouvoir regarder en face ces taches de notre passé et ne pas les occulter c'est ce qui nous fait avancer et apprécier le chemin parcouru et restant à faire vers l'humanité.
Très belle histoire, à interprétation multiple.
Merci beaucoup, SklabeZ !
RépondreSupprimerEvocation originale et magistrale, Joye. Qui donne la chair de poule. Je souhaite de tout mon coeur que toujours moins de gens aient envie de se repaître de ce genre d'événement. Certes, il n'en existe plus de pareil mais l'horreur a pris d'autres formes. Sur internet, à la télé, au cinéma, ou parfois dans la vraie vie quand la persécution n'a pas dit son dernier mot. Je pense par exemple à ces gens qui lors d'un "jeu" croyaient qu'ils envoyaient vraiment des décharges électriques à d'autres. Et qui continuaient malgré les cris de douleur. Est-il possible que l'éducation et l'amour bannisse à jamais cette soif malsaine et arrive à faire régner la compassion et le respect?
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