OUATE ET VERRE

OUATE ET VERRE

28.4.06

Chez moi, on a la France qu'on peut...

Chez moi,
On a la France qu'on peut :
Des échos des empires
Des traces imperceptibles.
Chez moi,
On a la France qu'on peut
Dans un mot, dans un nom,
Dans le soupir des
Souvenirs
Marqués par des pierres.

27.4.06

[rideau]

Elle. - Elle est comment ?
Lui. - Elle a la quarantaine.
Elle. - C'est-à-dire ?
Lui. - Qu'elle a la quarantaine.
Elle. - Alors, elle est bien ?
Lui. - Elle a la quarantaine, c'est tout ce que je vais dire.
Elle. - Et elle te plaît ?
Lui. - Quand est-ce qu'on mange ?

[après le dîner]

Elle. - Alors, tu me raconteras maintenant ?
Lui. - Te raconteras quoi ?
Elle. - Elle.
Lui. - Qui ?
Elle. - Elle, tu sais !
Lui. - Non, je ne sais pas !
Elle. - Elle qui a la quarantaine !
Lui. - Euh...
Elle. - Raconte-la-moi ! Elle est comment ?
Lui. - Viens baiser, ma douce loulou.

[après l'amour]

Elle. - Et maintenant ?
Lui. - Maintenant quoi ?
Elle. - Tu ne sais vraiment pas ?
Lui. - Euh...
Elle. - Et alors, elle ! Elle qui a la quarantaine ! ! ! Tu latrouvais comment ?
Lui. - Étonnante, une bombe, vachement bandante, je me la ferai bien celle-là si jamais l'occaze se présente. Voilà. T'es contente ?
Elle. - À ton avis ?
Lui. - Ben, je t'ai dit ce que tu voulais savoir.
Elle. - Non, au contraire, je ne voulais pas savoir ça.

[Rideau]

des achats

des verres à vin
une machine à coudre
une corde à sauter
un casque de vélo

puis je cause
avec Mike
mon quincallier
qui me parle
de sa moto
et quand je lui demande
pour son casque
il dit qu'il le garde
par derrière parce
qu'il y a des accidents
auxquels il ne veut pas
survivre
et il me sourit comme
si je ne venais pas
d'acheter

des verres,
une machine,
une corde
et un casque

Témoinage d'une condamnée...

25.4.06

The long and winding road that leads to my door...

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Là, quelqu'un vivait

















Là, quelqu'un vivait,
Faisant l'amour
Et la vaisselle...

24.4.06

Listen, do you want to know a secret?

écoute,
tu veux savoir un secret?
tu promets de ne pas le dire?
approche-toi

laisse-moi le chuchoter
dans ton oreille...


ah, oké, sorry,
non, finalement,
c'est pas important,
t'as raison, non, ça va
prends ton appel
chuis pas pressée

ah, oké, business ?
ben oui, bien sûr,
ah, non, non, non
finalement, c'était pas
important

23.4.06

Exposition van Rysselberghe

Théo,
je t'ai découvert
avec un grand plaisir.

D'abord, avec ton regard
à dix-huit ans,
Tu t'es présenté.

Ensuite,
Tes amis.
Ton boulot.
Tes voyages au Maroc,

Où tout semblait
S'exploser pour toi
Sous le soleil
D'un souk blanc
Et éblouissant.

Je t'ai vu grandir,
Te perfectionner
Avec chaque trace
Sous mes yeux,

De portrait en portrait,
De paysage en paysage,
Jusqu'à tes premières nues.

Et j'étais contente de savoir
Que tu les entamais vers
La fin de ta carrière,
Vers la fin
De ta vie.

Ton courage m'a rendue
Inexplicablement heureuse,
Ton insatisfaction avec
Ces premières baigneuses.

Et j'arrivais, béate,
À la dernière salle
Où j'ai pu
Ressentir encore
Un de ces frissons

Tels qu'on ressent
Une fois l'extase terminée,
Murmurant, épanouie,
La bouche tendue
Contre l'oreille de l'autre :

Ton dernier tableau
Ta Jeune fille au tub ...

Sa gorge exposée au plafond
Son dos cambré dans
La joie de l'eau dégringolant
De son éponge.

Dans la plus vive
Et la plus vivante
De tes œuvres,

J'ai vu
Un dernier chant d'amour

Pour la vie,
Immortalisée
Par ta brosse experte
Et tendre.

[Image : http://www.latribunedelart.com/Expositions/Expositions_2006/Rysselberghe_Tub.htm]

22.4.06

Neruda # 89

[ma traduction]

Quand je mourrai, je voudrai tes mains sur mes yeux :
je veux que la lumière et le blé de tes mains aimées
passent encore une fois sur moi leur fraîcheur :
ressentir la douceur qui a changé mon destin.

Je veux que toi tu vives pendant que moi je dors,
j'attendrai que tu respires l'arôme de la mer
que nous aimons ensemble
et que tu continues à marcher dans le sable où nous marchions.

Je veux que ce que j'aime continue à vivre
et toi que j'ai aimée et chantée plus que toute autre chose,
pour cela, que tu restes fleurissante, fleurie,

pour que tu atteignes tout ce que mon amour t'ordonne,
pour que mon ombre paraisse sur tes cheveux,
pour que, ainsi, se connaisse la raison de ma chanson.

21.4.06

Just once

Just once,
just once,

Damn,

Can't I be the one,
ben, celle,
celle qui te fascine ?

Just once,
can't I be the one
qui te fait délirer ?

Just once,
just once,
can't I be the one

celle sans qui
tu ne sais plus
respirer ?

Can't it be me
Just once ?

Magie

Que le magicien fasse paraître
Un lapin de son chapeau,
Qu'une colombe sorte
De sa manche,
C'est l'attente patiente
De l'assistante
Qui se tient
À côté,
Examinant ses ongles,
Qui me fascine plus
Que les applaudissements
De la foule.

Cologne

une grande
molaire
cassée
d'âge
et
noircie
d'abus
te sert
de
cathédrale
genaug

Rouen

Là, où les hérétiques brûlent,
L'horloge voilée de honte,
Les mendiants,
Les fous,
Les mendiants,
Les fous,

Là, où les hérétiques brûlent,
L'hôtel de ville flamboyant,
Les étudiants,
Les fous,
Les étudiants,
Les fous,

Là où les hérétiques brûlent
La maison où est né Corneille,
Les touristes,
Les fous,
Les touristes,
Les fous,

Là, où les hérétiques brûlent,
Des voix, des voix,
Partout des voix.

Madrid

Il y a des villes
Comme des gens
Que tu quittes
Sans larmes.

20.4.06

Femme et oiseau, hola Joan

[photo: Wikipedia]

toi
dans ta crazy
robe tu portes
ton panier
tubulaire
sur ta tête
servant de
perche
pour une
hirondelle
lunaire

Leçon du ciel, hola Joan

[image: Wikipedia]

lorsque tu voudras
me regarder
trouve d'abord
un vitrail

Femme assise II, hola Joan

[image: Guggenheim collection]

Attention,
avec ton long
cou gracieux,
tes dents blanches
comme des os
dans le désert,
tes petites mains
fragiles,
tes seins
étonnants,
et tant d'hommes
qui te regardent,
tu vas faire
des jalouses...

L'heure du rite

un froid si vif
au parvis
devant la cathédrale

(où l'on brûlait
les femmes qui osaient)

que le vent la pousse
jusqu'au troquet
où elle s'installe
au fond
dans le noir

loin du feu
loin de la lumière
loin du mauvais œil

pour se délivrer
de ses démons
en paix

inaccompagnée
(péché impardonnable)
elle fait tout de même
sa communion

mangeant de la galette
buvant du tilleul

18.4.06

Intervalle

si j'attends là
sans bouger,
silencieuse,
patiente

peut-être
qu'elle reviendra

comptant aux bouts
des doigts
les secondes
jusqu'à

la prochaine étoile
filante

17.4.06

Primeur

L'autre jour, je croisai une dame qui promenait une pomme de terre au bout d'une laisse.

Bouleversée par la curiosité, je ne pus pas me retenir et décidai de l'aborder.

-- Madame, si vous permettez, lui fis-je, c'est la première fois que je voie une pomme de terre au bout d'une laisse !

-- Ah oui ? réponda-t-elle avec un sourire. Comme quoi, on les porte dans les bras chez vous ?

-- Euh, oui, enfin, non, pas exactement, balbutiai-je. C'est-à-dire que personne chez moi ne fait promener des pommes de terre ! Euh, au moins, autant que je sache.

-- Non ? Pourquoi pas ? ! ? Son sourire s'affaissa.

-- Ben, parce que...heu...ce ne sont que des légumes !

-- Ah oui ? Il y eut comme un brin subtil de mépris dans sa voix. « Et que devrait-on faire avec des légumes, à votre avis, Mademoiselle ? » continua-t-elle.

J'étais perplexe et avant de bien réfléchir, je dis « Ben, les manger, non ? »

Elle me fixa d'un air ahuri, ses yeux devenaient plus étroits.

-- Les manger ! Ça alors ! Mais d'où venez-vous, au fait ?

-- Ben, des USA, Madame !

D'un coup, elle prit la pomme de terre dans ses bras et la serra contre sa poitrine, la cachant de ma vue.

-- Ben, ça, s'écria-t-elle. J'aurais dû m'en douter ! ! ! Vous êtes tous des sauvages là-bas !

Et sans me dire au revoir, elle s'en alla.

Okay, bon, c'était une dingue, me dis-je, en reprenant mon chemin.

Et puis, je croisai un homme avec une poussette. Je m'arrêtai pour admirer son bambin.

À mon étonnement, je vis que c'était une branche de céleri.

16.4.06

Lisbonne, le métro

le petit gars
avance
dans le wagon,
jouant d'un lourd
accordéon,

son chien miniscule
est accroché
à une de ses maigres
épaules

son maître
ne regarde pas
les passagers
dans les yeux,

mais le chien si...

au retour,
c'est une aveugle
qui y passe,
sans accordéon,
sans chien,

abordant
les passagers
avec sa musique
où elle loue
son Dieu
miséricordieux,

elle qui n'a que deux
trous vides
où il devrait y avoir
des yeux

Promenade du dimanche (16.04.06)

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15.4.06

La Rue du Mont

Je connais cette pente.

Elle résonne dans mes hanches
Dans le creux de mon dos
Dans cette partie plate
Juste au-dessus de mes
Fesses

Ça brûle
Cette pente

Quelqu'un de plus fort que moi
A construit ce mur ;
Quelqu'un de plus habile que moi
Y a fait grimper des lierres.

Mes respirations
Ponctuées des pas
Résolus
Trahissent mes efforts
En dépit du sourire
Que j'offre
À ce ciel tout brisé
Et tout à fait
À moi...

Prête-moi ta langue

Prête-moi ta langue
ta douce langue
qui fait des ravages
dans mon cœur d'étrangère

Prête-moi ta langue
sa douce musique
qui réverbère
dans mes songes d'étrangère

Prête-moi ta langue
sa dure perfection
qui s'assouplit
dans le temps

Prête-moi ta langue
que je la garde
à côté de celle
que m'a donnée ma mère

Prête-moi ta langue
le temps qu'on aille
ensemble faire des folies

Ténèbres. Lumière. Ténèbres.

Noir.

[...]

Devant la fenêtre, elle voit des nuages gros comme des duvets polonnais qui passent, allumés en haut par le soleil, laissant voir, par manque de pudeur, leurs dessous bleuâtres. Le soleil essaie de chasser cette bande de friponnes, mais le bleu-gris est tenace et ils gardent leur place dans l'intervalle entre ciel et hommes.

[...]

Ténèbres. Lumière. Ténèbres.

[...]

De nouveau, elle fixe le ciel et voit que le soleil se lasse de sa lutte avec ces chipies nuageuses. Dans l'instant que cette pensée lui vient, la lumière fait un dernier au revoir et puis s'écarte pour aller faire ses courses ailleurs.

[...]

Noir.

13.4.06

Caniche

[...]

De toute manière, elle se retrouva dans cette maison dans un joli petit village. Chaque matin, elle descendit au village pour faire ses petites courses, et grimpait la pente pour rentrer, haletant, tout en s'étonnant à quelle rapidité le rythme d'une petite vie pouvait s'établir. L'après-midi, après un déjeuner qu'elle mettait une heure à préparer, la femme solitaire mangeait lentement, un bouquin à côté de son assiette.

Un jour, après l'averse exigée (l'Ardenne, ayant, elle aussi, sa quantité de prévisibilité), elle sortit prendre l'air. Après avoir découvert la petite promenade menant à St-Thibaut, ses pas s'y redirigeaient joyeusement à encore des découvertes et puis encore des retrouvailles : les grands sapins traînaient des lierres comme des dentelles aux jupons d'une coquette, un ruisseau se faufilait à leurs pieds, riant et jasant au plaisir de les revoir.

Elle s'arrêta avant d'y arriver pour écouter attentivement de loin la conversation du ruisseau et dut admettre que le son des voix lui manquait quand même un peu.

D'un coup, un méchant petit caniche vint aboyer à tue-tête de l'autre côté du sentier en ponctuant chaque tirade des grognements qui disaient « Gaffe, hein, faites gaffe, c'est du vrai, et à l'envoi, je morrrrrds ! »

Sale bête ! La femme avait envie de lui filer un grand tchlak avec son parapluie, mais elle sut que le maître du clebs était probablement pas loin, sinon en train de regader la scène d'un air approbateur.

Alors, elle se contenta d'un « Coucou, le chien, ça va ? » et puis, d'un ton un peu plus sérieux, « Sois sympa, sois sympa le chien ! » Il hésita, comme pour calculer ses chances. Voyant cela, elle lui laissa pourtant le dernier mot et s'éloigna vers la forêt. Le chien en profita lachement pour lui faire savoir exactement ce qu'il pensait des femmes solitaires qui se promenaient dans son territoire, hein, grr, hein !

Cette sale bête n'allait pas tout de même gâcher son pelerinage, se pensa-t-elle.. Elle l'oublia avant que le dernier grognement soit parti de son stupide petit museau, et mit ses propres oreilles à l'écoute des potins que le ruisseau était en train de balbutier aux arbres.

Au retour, elle revit le caniche, mais cette fois-ci, il y avait une clôture entre elle et lui. Toutefois, lui appela son copain et un petit Scottie sortit de la maison pour voir, et puis le fixa d'un œil curieux comme pour lui dire « Mais quoi encore, Pierre, qu'est-ce qui te prend maintenant, gros con ? T'as oublié qu'il y a une clôture entre elle et toi ou quoi ? »

Le caniche, hardi, reprit son refrain que la femme traduisit un peu comme « Tarrrrrrrre ta gueule, grrrrrrrrande blonde, je vais t'avoirrrrrrrrr, tu verrrrrrras mes crrrrrrocs dans une de tes grrrrrrosses fesses, hein ? ! ? »

D'un coup, une voix basse et fâchée se fit entendre depuis la maison et Pierre le caniche eut droit à une briève mais satisfaisante humiliation. Il se tut à l'instant même. Son petit copain le regarda d'un air embarrassé comme pour lui dire « Mais ça finit toujours de la même manière, Pierre, t'es bête ou quoi ? »

Et la femme rentra, portant un sourire grand comme la vallée qu'elle venait de longer.

10.4.06

Le fou à la plaza mayor

Accroupi au coin
dans l'ombre,
tu hurles.

Ta musique fait des échos le long de la calle
sous les arcades.

Les touristes au soleil
paient leurs consommations
avec l'or des conquistadores.

Cela te fait rire,
fou-rire, sage-rire,
no importa,

Mais toi tu ris haut et fort
à l'ombre
tandis que leur musique à eux
s'étouffe sous le plein soleil
de midi.

Ta musique fait des échos le long de la calle
sous les arcades.

Plus loin, dans une plaza minor
il y a une fontaine où chacun
boit à sa soif, gratuit
et jusques là,

Ta musique fait des échos le long de la calle
sous les arcades.